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rare, ne lui était, je crois, connu que par quelques mots de la langue philosophique. Il avoue qu'il ne lisait les
auteurs grecs que dans la traduction, et l'on n'a nulle preuve qu'il entendît l'hébreu[37]. Mais son instruction
littéraire était fort étendue; elle embrassait à peu près tous les auteurs de l'antiquité latine connus de son
temps, et le nombre en était plus grand qu'on ne pense. Le XIIe siècle était plus lettré que le XVe ne l'a laissé
croire, et il n'est pas sûr que l'esprit humain ait tout gagné à cesser de se développer suivant la direction que le
moyen âge lui avait donnée, et à subir cette révolution qu'on appelle la renaissance.
[Note 35: Il est dit de lui dans une épitaphe: «Ille sciens quicquid fuit ulli scibile;» et à la fin: «cui soli patui;
scibile quicquid erat.» C'est aussi de lui qu'on a dit: «Non homini, sed scientiae dees; quod nescivit.» (Ab. Op.,
préf. in fin. Gervaise, t. II, p. 150.)]
[Note 36: C'est la loi quinque pedum Praescriptione, C. fin. regund., l. III, tit. XXXIX. Sur cette loi, qui n'est
pas fort claire en effet, Accurse dit que Pierre Baylard (Petrus Baylardus ), qui se vantait de donner un sens
raisonnable à tout texte, quoique difficile qu'il fût, a dit: Je ne sais pas. Or, cela ne signifie point que
Baylardus sût le droit; de plus, on conteste que ce Baylardus soit Abélard, et l'on dit que ce pourrait être un
Johannes Bajolardes, professeur de droit dont parle Crinitus. Enfin il n'est rien moins qu'établi que le Codex
repetitae proelectionis, d'où cette loi est extraite, et même les textes du droit romain en général fussent connus
en France avant la mort d'Abélard. On dit que l'enseignement du droit commença à Bologne vers 1180, et à
Paris vingt ans après. La question me paraît bien discutée dans Bayle. (Cf. Ab. Op., préf. apolog. Accurs. v°
LIVRE PREMIER. 23
Abelard, Tome I
Praescript. Alciat. Lib. de quinq. ped. Praescr. Crinitus, De Honest. Discip.. l. XXV, c. IV. Pasquier,
Recherches de la Fr., l. VI, c. xvii, et l. IX, c. xxviii. Bayle, art. Abélard. Duboulai, Hist. Univ., t. II, p.
577-680.)]
[Note 37: Ouvr. inéd., Introd. xliii, xliv, et Dialec., p. 200 et 206. Je parle de l'hébreu, parce qu'on avait alors
la prétention de le savoir. Tous les historiens et même Abélard disent qu'Héloïse le savait, et d'Amboise a
montré que les juifs, qui en général ont conservé la connaissance de leur langue, participaient au mouvement
des études à Paris. (Ab. Op., préf. in fin.) Abélard ne me semble savoir de cette langue que les mots cités par
les interprètes des bibles latines (Voyez son Hexameron, passim, et du présent ouvrage, le liv. III, c. viii.)]
Toutefois la véritable science d'Abélard était la philosophie. C'est lui qui a fixé la forme, sinon le fond de la
scolastique. Rien, s'il faut en croire ses auditeurs, ne peut donner idée de l'effet qu'il produisait en l'enseignant,
et jamais aucune science ne paraît avoir eu de propagateur plus puissant. Comme chef d'école, il rappelle, s'il
n'efface, pour l'éclat et l'ascendant, les succès des grands philosophes de la Grèce. Cependant cet
enseignement était plus original par le talent que par les idées, et supposait plus de sagacité critique que
d'invention. Non content d'expliquer avec une facilité et une subtilité que ses contemporains déclaraient sans
égales, les secrets de la logique péripatéticienne et de promener les esprits attachés au fil du sien dans les
détours de ce labyrinthe dont il trouvait toujours l'issue, il mêlait, autant qu'il était en lui, à l'interprétation de
la brièveté profonde de ce qu'il connaissait du texte l'analyse intelligente et libre des commentaires et des
additions de Boèce et de Porphyre; il complétait ses exposés par des citations, bien comprises et
lumineusement développées, de Cicéron qui, lui aussi, a traité, dans ses Topiques et dans quelques passages
de la Rhétorique à Herennius, des parties de la logique; de Thémiste, qui a laissé des paraphrases d'Aristote;
de Priscien, qui a touché à la logique par la grammaire; enfin de saint Augustin, qui passait pour l'auteur d'un
traité alors étudié sur les catégories, et qui a dû peut-être à son rôle dans la scolastique quelque chose de son
influence dominante sur la théologie française. Le caractère éminent de l'enseignement d'Abélard était, suivant
un de ses auditeurs, une clarté élémentaire. On trouvait qu'il fuyait l'appareil pédantesque, et qu'il mettait la
science à la portée des enfants[38].
[Note 38: Johan. Saresb. Metal., l. III, c. i. Il serait intéressant de fixer la liste des ouvrages anciens que les
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